Que retenir sur l'histoire du roman en France à travers les siècles ?

Le sujet est très vaste et on pourrait évoquer cette histoire du roman sur des centaines et des centaines de pages !

Copiedouble essaie pourtant de vous donner ci-après un RÉSUMÉ de cette histoire du roman avec quelques titres et auteurs importants ainsi que les grandes lignes de l'évolution de ce genre littéraire.

Naissance du roman au Moyen-Age

On considère que le roman naît au Moyen-Age avec un récit tel que Tristan et Iseut rapporté par différents auteurs ou encore les récits composés et signés par Chrétien de Troyes tels que Erec et Enide, Le Chevalier à la Charrette, Le Chevalier au Lion ou encore Le Conte du Graal. Pourtant ces textes sont rédigés en vers donc encore très proches de l'épopée et de la poésie. Ils montrent des personnages héroïques qui sont courageux, nobles de naissance et nobles de caractère. Les combats sanglants côtoient les scènes courtoises, c'est-à-dire ce qui se rapporte aux moeurs de la cour et aux sentiments amoureux. Le merveilleux est également présent. Notons au passage que ces romans sont destinés à être contés à voix haute et qu'ils vantent les qualités de la noblesse, la classe dominante au Moyen-Age.

A partir du XVIe siècle, le roman s'écrit en prose. Ainsi en 1532 François Rabelais publie Pantagruel puis en 1535 Gargantua, deux romans qui privilégient le registre comique burlesque mais qui expriment aussi les idées du mouvement humaniste. Là encore, le roman se fait le reflet des questions qui préoccupent une époque.

Au XVIIe siècle, les romans appréciés des lecteurs sont de longs récits sentimentaux dits « romans-fleuves » comme le roman pastoral L'Astrée d'Honoré d'Urfé qui fait plus de 5 000 pages ou le roman précieux Clélie, histoire romaine de Madeleine de Scudéry qui représente plus de 10 000 pages ! Toutefois ces œuvres sont jugées faibles au niveau de la qualité littéraire ; d'ailleurs la postérité ne les a pas retenus non plus. Au XVIIe, il n'est donc pas glorieux d'être romancier. Seuls le théâtre et la poésie sont des genres littéraires nobles. Un roman de cette époque fait néanmoins exception : La Princesse de Clèves, un récit court de très grande qualité qui inaugure le roman d'analyse, c'est-à-dire le roman à la fois sentimental et psychologique. Il fait l'éloge d'une héroïne aussi belle que noble, qui a le courage de surmonter ses désirs et fait face avec raison aux dangers de la passion. L'oeuvre est écrite par Madame de Lafayette, qui le publie de façon anonyme en 1678.

L'histoire du roman peut désormais vraiment commencer.

Au XVIIIe siècle, époque marquée par les Lumières, l'heure est plutôt à la littérature d'idées, notamment avec le conte philosophique. Cependant des romans sont publiés. A travers eux, on peut retrouver des sujets qui intéressent les intellectuels de cette époque comme la liberté et le rôle des classes sociales. Manon Lescaut (1731) de l'Abbé Prévost est par exemple un roman de moeurs qui raconte une histoire d'amour mais qui interroge aussi la relation du fils à l'autorité du père et critique l'ordre social et moral de la société. Le roman épistolaire Lettres persanes (1721) de Montesquieu propose quant à lui une réelle critique de la société à travers des lettres fictives d'étrangers, des Persans, qui portent un regard neuf sur toutes nos habitudes, qu'elles soient politiques ou comportementales. Autre exemple, Les liaisons dangereuses (1782) de Choderlos de Laclos, roman épistolaire lui aussi mais libertin. Il traite également des contraintes sociales et morales d'une époque.

Le roman : un genre littéraire majeur au XIXe siècle

Au XIXe siècle vient enfin le grand siècle du roman.

Les romans sont de tous les types : historiques, sociaux, d'apprentissage, d'aventures, de science-fiction... Parmi les très nombreuses oeuvres marquantes de ce siècle, on peut citer par exemple : Le rouge et le noir (1830) de Stendhal, Le père Goriot (1835) de Balzac, Les trois Mousquetaires (1844) de Dumas, Madame Bovary (1857) de Flaubert, Les Misérables (1862) de Victor Hugo, Le tour du monde en quatre-vingts jours (1872) de Jules Verne, Au Bonheur des dames (1883) de Zola ou encore Bel-Ami (1885) de Maupassant.

Plus que jamais, ces romans reflètent leur époque. Ces œuvres sont marquées par la révolution industrielle et ses conséquences : l'essor de la bourgeoisie, le développement de la classe ouvrière et l'espoir d'un progrès social accompagnant le progrès technique.

Recherche de la nouveauté dans la première moitié du XXe siècle

Au XXe siècle, la diversité continue à prospérer en matière de romans. Par exemple, au tout début du siècle, A la recherche du temps perdu (1913 à 1927) de Marcel Proust approfondit l'étude psychologique d'un personnage, cherchant à capter ses souvenirs et ses pensées. Le Grand Meaulnes (1913) d'Alain-Fournier interroge aussi les relations humaines.

Cependant la première guerre mondiale bouleverse les mentalités. Les romans publiés explorent désormais la tragédie de l'homme et posent un regard désabusé ou révolté sur l'existence. On peut citer par exemple Voyage au bout de la nuit (1932) de Céline qui montre le traumatisme des soldats et met en scène un personnage qui est un anti-héros. Son roman dénonce la cruauté de la guerre et de la vie en général en utilisant un langage parlé. La Condition humaine (1933) d'André Malraux montre quant à lui un engagement de l'homme dans un contexte politique tandis que La nausée (1938) de Jean-Paul Sartre constitue un roman philosophique qui s'éloigne des chemins traditionnels de la littérature romanesque. Albert Camus dans son roman L'étranger (1942) place au centre de son histoire un anti-héros particulièrement difficile à cerner, en soignant une écriture novatrice qui surprend le lecteur, sans description de sentiments.

Les romanciers cherchent donc à se démarquer de leurs prédécesseurs du XIXe siècle. Dans cet esprit, renforcé par le nouveau traumatisme que constitue la seconde guerre mondiale, des auteurs repoussent encore les limites de l'écriture, créant un mouvement dans les années 1950 qu'on nomme le Nouveau Roman : Marguerite Duras fait paraître Un barrage contre le Pacifique (1950), Alain Robbe-Grillet Les Gommes (1953), Michel Butor La Modification (1957), Nathalie Sarraute Les Fruits d'Or (1967)... Les écrivains refusent l'image traditionnelle du personnage de roman décrit minutieusement et souvent même le principe de construire une histoire dans leur récit.

Diversité des styles dans la deuxième moitié du XXe et au XXIe siècle

Après la rupture signifiée par cette multitude d'innovations littéraires en matière de roman, la diversité s'installe et se développe dans la deuxième moitié du XXe siècle. Elle se poursuit aujourd'hui encore. Les styles sont très variés et s'adressent à des publics tout aussi variés : populaires ou érudits. Dans la littérature adulte de production française et qui remporte un vif succès commercial, on peut mentionner les romans policiers comme ceux de Fred Vargas qui a publié par exemple Pars vite et reviens tard en 2001. On trouve aussi de nombreuses auto-fictions ou romans autobiographiques tels ceux d'Amélie Nothomb qui a écrit Stupeurs et Tremblements en 1999. La tragédie de l'homme confronté à son destin continue également à constituer un sujet d'écriture de romans appréciés du grand public. C'est le cas par exemple de Jean-Marie Le Clézio qui a publié Désert en 1980 et Laurent Gaudé avec Le Soleil des Scorta, publié en 2004). Notons au passage que les œuvres se reportant précisément à la tragédie des migrants constituent ce qu'on appelle « la littérature de l'exil ».

Aujourd'hui, le roman représente le genre littéraire le plus lu en France.