En cours de français, on vous demande souvent d'étudier « les registres littéraires » d'un texte.

 

A quoi cela correspond ? Tout simplement à l'impression de lecteur que vous avez face à ce texte.

Autrement dit : chercher les registres littéraires d'un texte c'est identifier les effets que l'auteur a voulu produire sur le lecteur.

A chaque impression ressentie correspond un registre. Notons au passage que l'usage du mot « registre » est aujourd'hui moins fréquent. On préfère souvent parler de « tonalité ».

EXEMPLES D'IMPRESSIONS ET DE REGISTRES :

Vous pensez que l'auteur a cherché à faire sourire voire à faire rire le lecteur ? Le texte présente donc un registre comique.

Vous pensez au contraire que l'auteur souhaite attendrir le lecteur jusqu'à le faire pleurer ? Dans ce cas le texte présente un registre pathétique.

Comment définir cette notion de registre littéraire ?

Un registre littéraire correspond à un aspect du texte, plus précisément à sa tonalité, c'est-à-dire à l'effet produit sur le lecteur et voulu par l'auteur.

Dans un même texte, il peut y avoir plusieurs registres littéraires.

A quoi ça sert ?

Distinguer le registre littéraire d'un texte est surtout intéressant si on peut le prouver. C'est alors qu'on sera obligé de s'intéresser aux moyens mis en œuvre par l'auteur pour créer tel registre. En effet, pour donner du relief à son texte, lui donner cette tonalité, il utilise un certain vocabulaire, il a recours à des figures de style, il emploie tel rythme de phrase, etc.

L'identification du registre permet de bien comprendre le texte et d'analyser ensuite tous les procédés employés par l'auteur. Ceci est donc très utile pour la lecture analytique qui permet de rédiger un commentaire de texte à l'écrit ou d'exposer une explication de texte à l'oral.

Ne pas voir tel ou tel registre présent dans un texte, c'est passer à côté d'un des objectifs de l'auteur. Par exemple, si on ne voit que le registre comique (c'est-à-dire l'aspect amusant) dans la fable Le corbeau et le renard de La Fontaine sans voir le registre didactique (c'est-à-dire la morale), on ne peut pas dire qu'on a entièrement compris le texte.

Quels sont les différents registres littéraires ?

Il est difficile d'en établir la liste précise. Toutefois on peut retenir les registres les plus couramment rencontrés dans les textes.

LES REGISTRES A CONNAITRE ABSOLUMENT

LE REGISTRE COMIQUE

Le registre comique est présent chaque fois que l'auteur cherche à nous faire sourire ou nous faire rire. Il peut employer à cette fin des « procédés comiques » (voir Fiche sur les procédés comiques) mais aussi d'autres moyens tels que l'ironie, l'humour noir, la caricature, l'hyperbole, le recours à des animaux qui parlent, etc.

Exemple : le registre comique est largement présent dans L'avare de Molière et d'une manière générale dans toutes les comédies de Molière.

LE REGISTRE PATHÉTIQUE

Le registre pathétique est un registre qui cherche à nous émouvoir. L'auteur insiste par exemple sur la cruauté de la situation, nous montre le désarroi du personnage victime, décrit ses larmes et utilise tous les moyens à sa disposition pour que le lecteur ou spectateur s'apitoie. Au cinéma, cela serait accompagné d'une musique à base de violons, pour nous tirer des larmes. Dans un texte, l'écrivain emploie par exemple des antithèses, des champs lexicaux, des éléments descriptifs, etc.

Exemple : Les Misérables de Victor Hugo met en scène Cosette, une fillette orpheline et maltraitée. Ce roman présente donc un registre pathétique.

LE REGISTRE DRAMATIQUE

Le registre dramatique est un registre qui crée une tension. L'auteur retarde l'action suivante et la présente comme essentielle ou décisive. Au cinéma, la musique pourrait accompagner cette scène avec un rythme saccadé, pour bien faire comprendre au spectateur qu'il va se produire quelque chose. Dans un texte, l'auteur suspend sa narration ou utilise souvent une prolepse (c'est-à-dire une anticipation), qui annonce la suite comme étant très importante mais sans la révéler. Le lecteur attend, tendu.

Exemple : Dans Manon Lescaut de l'Abbé Prévost, le narrateur déclare « Nous nous donnâmes ainsi deux logement, l'un à la ville et l'autre à la campagne. Ce changement mit bientôt le dernier désordre à nos affaires, en faisant naître deux aventures qui causèrent notre ruine ». Ce passage est marqué par le registre dramatique. Ainsi le lecteur se demande quel lien il peut y avoir entre le fait d'avoir deux logements et les conséquences catastrophiques annoncées par le mot « ruine ». Il a hâte de connaître la suite et se trouve un peu tendu, ne sachant pas vraiment ce qu'il va se passer mais s'attendant au pire.

LE REGISTRE TRAGIQUE

Le registre tragique est un registre qui insiste sur la fatalité qui s'abat sur les personnages. Ceux-ci affrontent avec courage leur destin, faisant preuve au passage d'un réel héroïsme, se battant avec courage et noblesse. Souvent, ils demeurent cependant impuissants face à cette fatalité.

Exemple : dans Le Soleil des Scorta de Laurent Gaudé, les personnages se battent de génération en génération pour avoir un avenir meilleur. Le roman présente un registre tragique.

LE REGISTRE DIDACTIQUE

Le registre didactique est un registre qui nous fait réfléchir, nous enseigne quelque chose ou nous éduque.

Exemple : toutes les Fables de La Fontaine nous donnent une leçon de vie, que la morale soit explicite ou bien à comprendre par soi-même. Les fables ont donc toutes une portée didactique.

LE REGISTRE ÉPIQUE

Le registre épique est un registre qui fait référence à un combat ou à une aventure extraordinaire. Le mot « épique » vient d'ailleurs de l'épopée. Le personnage est un combattant, un guerrier, ou bien présenté comme tel. Les lieux sont des scènes de combat, des champs de bataille ou traités comme tels. L'auteur ne décrit pas forcément un héros en train de se battre réellement ou d'affronter mille aventures pour accomplir une quête mais il utilise les mêmes moyens.

Exemple : dans Au bonheur des dames de Zola, après le passage des clientes, le magasin semble dévasté comme un champ de bataille. Dans cette description, l'auteur utilise un registre épique.

LE REGISTRE MERVEILLEUX

Le registre merveilleux est un registre qui nous emporte dans l'imaginaire et nous émerveille. L'auteur nous présente des faits extraordinaires mais de manière à ce que nous les acceptions. Ainsi, dans un texte de registre merveilleux, il peut y avoir des fées, des animaux qui parlent, des personnages qui volent dans les airs, des sorciers aux pouvoirs magiques, des elfes, des ogres, etc.

Exemple : Le petit Chaperon rouge de Perrault, comme tous les contes, présente un registre merveilleux car le loup est doté de la parole et discute avec le petit Chaperon rouge, ce qui ne surprend pas le lecteur.

LE REGISTRE FANTASTIQUE

Le registre fantastique est un registre qui sème le doute chez le lecteur ou spectateur quant à la faisabilité de ce qu'on lui présente. Le texte oscille entre rêve et réalité. Il met en scène des phénomènes surnaturels, qu'on ne peut expliquer mais que certains peuvent admettre comme étant vrais : par exemple des fantômes, des médiums... Le personnage confronté à ces phénomènes est comme le lecteur : il ne sait pas comment les interpréter ni s'il peut les considérer comme étant réels. Souvent il imagine même qu'il devient fou.

Exemple : dans Le Passe-muraille de Marcel Aymé, quand le personnage se rend compte qu'il peut passer à travers les murs, il est surpris et contrarié. Il consulte même un médecin. Ainsi le personnage n'admet pas cette faculté extraordinaire comme naturelle, bien au contraire. Le texte présente donc un registre fantastique.

LE REGISTRE LYRIQUE

Le registre lyrique est un registre qui place le lecteur en confident, témoin des sentiments personnels du personnage.

Exemple : dans Le dernier jour d'un condamné de Victor Hugo, le narrateur dévoile ses sentiments lors des dernières heures de sa vie, avant son exécution. Ce court roman présente donc un registre lyrique.

 

AUTRES REGISTRES (fréquents mais moins indispensables à connaître)

LE REGISTRE BURLESQUE

Le registre burlesque est un registre comique qui traite d'un sujet noble ou d'un personnage noble de façon inadaptée, c'est-à-dire dérisoire, peu glorieuse voire irrespectueuse. Le décalage entre le sujet et le traitement participe à la création du rire.

Exemple : dans Le roi se meurt d'Eugène Ionesco, le roi se met à boiter. Normalement, un roi est montré dans toute sa splendeur. Ici il boite et cela fait rire le spectateur. La scène présente donc un registre burlesque.

LE REGISTRE HÉROÏ-COMIQUE

Le registre héroï-comique est l'inverse du registre burlesque : c'est un registre comique qui traite de façon noble un sujet ou un personnage qui ne le mérite pas. Là encore, le décalage entre le sujet et le traitement participe à la création du rire.

Exemple : dans L'Huître et les plaideurs de La Fontaine, deux pèlerins se contestent un droit et argumentent pour… non pas posséder un trésor mais une simple huître trouvée sur la plage ! A cause de ce décalage qui existe entre la forme que prend la dispute, à savoir un dialogue argumenté, et l'objet dérisoire de cette dispute, on peut dire qu'il y a présence d'un registre héroï-comique dans cette fable.

LE REGISTRE SATIRIQUE

Le registre satirique est un registre comique qui sert non seulement à amuser le lecteur ou spectateur mais aussi à dénoncer une réalité ou un défaut humain. Un texte satirique est en effet un texte critique voire moqueur.

Exemple : dans L'Huître et les plaideurs de La Fontaine, un juge arrive et gobe l'huître. Plutôt que d'écouter les arguments de chaque pèlerin, il choisit donc de se servir. Ceci dénonce le comportement des gens de justice, qui pensent à leur propre intérêt plutôt qu'à satisfaire leurs clients. Cette fable présente donc également un registre satirique.

LE REGISTRE ÉLÉGIAQUE

Le registre élégiaque est un registre lyrique particulier : il place le lecteur en confident mais de sentiments personnels relevant du regret ou de la déploration. Justement, l' « elegia » était un chant funèbre. Un texte abordant la perte de quelque chose ou de quelqu'un relève du registre élégiaque.

Exemple : le Sonnet pour Hélène (« Quand vous serez bien vieille... ») de Ronsard s'adresse à une femme qui, lorsqu'elle sera âgée, regrettera sa jeunesse perdue. Le poème présente donc un registre élégiaque.

LE REGISTRE ÉPIDICTIQUE

Le registre épidictique est un registre qui glorifie ou condamne quelqu'un ou quelque chose. Il s'agit d'un éloge ou d'un blâme. Souvent le texte est donc un portrait au cours duquel l'auteur peut avoir recours aux métaphores, hyperboles, comparaisons, etc.

Exemple : Femme nue, femme noire de Senghor est un poème dans lequel la beauté de la femme noire est célébrée. Ce texte est un éloge ; il présente donc un registre épidictique.

LE REGISTRE POLÉMIQUE

Le registre polémique est un registre qui cherche à créer le scandale. Le but est de choquer le lecteur ou spectateur. Le mot « polémique » vient d'ailleurs du grec « polemos », la guerre.

Exemple : dans J'accuse de Zola, l'auteur s'en prend directement à différentes personnalités politiques et militaires pour créer volontairement le scandale et être traduit devant la justice. Son texte présente un registre polémique.

LE REGISTRE DÉLIBÉRATIF

Le registre délibératif est un registre qui place le lecteur en juge, lui montrant deux positions différentes dans le cadre d'un choix difficile à faire.

Exemple : dans Le Cid de Corneille, le personnage hésite entre venger son père, en imaginant toutes les conséquences que cela aurait, et ne pas venger cet honneur, en pensant également à toutes les conséquences qu'impliquerait cette deuxième option. Les tirades qui montrent ce tiraillement relèvent du registre délibératif.

 

Nous espérons que cette fiche vous sera utile. Bonnes révisions !